OU QUI SE RESSEMBLE S'ASSEMBLE

          C’est vendredi, en fin d’après-midi, je savoure un moment de repos assise à la terrasse d’un café de l’Anse Vata en compagnie de quatre copains.

          La semaine s’est finie sur un DS ultra compliqué en math ! Je sais que je m’en suis très bien sortie mais j’ai la tête serrée comme dans un étau. Alors je suis affalée comme de droit dans un fauteuil encombré de coussins moelleux, goûtant au plaisir d’être entre amis et de parler de tout et de rien sans me prendre la tête.

          En fait de parler, j’écoute plutôt la discussion sur « Faut il mettre de la crème solaire avant ou après s’être mis du fond de teint quand on va à la plage ? » côté fille et « qui est le plus grand joueur de foot en réseau ? » pour les garçons.

          Aucun de ces deux sujets ne me passionne vraiment, mon attention se reporte sur les autres clients. Certains sont accoudés au bar et se désaltèrent d’une bonne pression bien fraîche, d’autres s’offrent un soda en faisant une partie de fléchettes, d’autres encore bouquinent un jus à la main.

          Calée dans mon siège, cachée derrière mes lunettes de soleil, j’observe tout un chacun quand tout à coup mon regard tombe sur un véritable beau gosse. Un Apollon, musclé à souhait, bronzé comme il faut, les cheveux bruns courts mais pas trop…. Bref un savant mélange de Jason Momoa et Hugh Jackman, le tout en version ado-adulte, un éphèbe quoi !

          BOUM ! BOUM ! Mon cœur fait des ratés avant de se mettre à battre la chamade, j’ai des milliers de papillons dans mon bidon et ma libido grimpe en flèche.

          Je ne dirai pas que j’ai un coup de foudre (pour cela il faudrait que j’entende sa voix parce que pour moi la voix joue beaucoup en matière de séduction et de désir sexuel) mais j’ai quand même reçu un bon coup d’éclair dans mes entrailles.

          Dès qu’il se passe la main dans les cheveux, aïe ! aïe ! aïe ! je frissonne de désir. On dirait un mannequin qui pose pour une pub de shampoing « parce qu’il le vaut bien ! »

          Et son sourire est si blanc, si éclatant, il doit avoir une bonne brosse à dent et l’utiliser comme recommandé et aller régulièrement chez le dentiste.

          Sans parler de sa pose : décontractée mais pas vulgaire, genre mec qui attend sans attendre, mystérieux mais pas trop…

          Et ses fringues : décontractées mais pas vulgaires, genre passe-partout, griffées mais pas luxueuses, remarquables mais pas trop …

          Bref un gars qui prends soin de son corps et de son apparence, un adonis qui le sait et , faut pas se leurrer, doit certainement en jouer !

          Mes hormones sont sans dessus-dessous, mes pulsions se concentrent au niveau de ma petite culotte ! Qu’est-ce qu’il fait chaud ! Heureusement que j’ai de quoi me sustenter (je parle du cocktail de jus que j’ai commandé !)

          Déjà dans ma tête, je me joue un scénario digne d’un coup de foudre à Bora Bora, sauf qu’on est à Nouméa !

          Du genre, on se retrouve tous les deux en train de payer nos collations en même temps et le serveur, sans s’en rendre compte et nous non plus, inverserait nos cartes bleues en nous les rendant. Cartes de paiement sur lesquelles il y a nos numéros de téléphone (je vous rappelle que c’est du cinéma, alors je peux inventer ce qui me plaît pour atteindre mon objectif). Du coup le mec me rappelle le lendemain pour qu’on se restitue respectivement nos cartes et finalement il m’invite à boire un coup. On se rend compte qu’on est trop sur la même longueur d’onde, on se fait un ciné suivi d’un Mac DO aux canons du Ouen Toro. Et là tout à coup, il se met à pleuvoir des trombes d’eau. Heureusement il n’habite pas loin. On se retrouve chez lui, trempés jusqu’aux os. Là il se déshabille sans pudeur et tout nu me prend par la taille et m’embrasse fougueusement. Lentement ses mains parcourent mon corps en me déshabillant, subtiles caresses, extase intense ….

CHERI ! CHERI ! CHERI !

          Un effroyable cri transperce l’atmosphère tel un superbolt et me sort de mon fantasme : c’est une blonde, fort bien foutue, en tenue très légère qui hurle de plaisir semble t-il, en se précipitant sur l’acteur principal de  ma romance.

          Heureusement que j’ai mes lunettes de soleil et que je sirote à la paille ma boisson sans quoi chacun verrait mes yeux totalement exorbités et ma bouche grande ouverte.

          Je me ressaisis vite, bien que cela ne soit pas facile en les regardant se rouler de patins avec la langue et tout le bataclan !

          Complètement sonnée, j’avale à petites gorgées mon nectar. Il faut que je pose les choses, que j’y voie plus clair.

          Lui, il est beau comme un dieu ; Elle, elle est miss corps parfait. Du coup, le dicton qui se ressemble s’assemble fonctionne.

          Moi, je ne suis pas un talus, je dirai que je me situe dans la moyenne basse des jolies filles. J’ai été attirée par Lui car les contraires s’attirent.

          Si je pousse mon raisonnement plus loin, je suis une personne intelligente (mes résultats scolaires notamment le prouvent !) et Elle, au vue de ce qu’elle dégage (cela n’engage que moi !) elle ne respire pas la clairvoyance (oui ! cela est manifestement une marque de jalousie ! mais c’est mon histoire ! ok !).

          De ce fait comme il est mon opposé et son alter égo (son double ou sa moitié, c’est comme vous voulez !), j’en conclue que Lui aussi ne brille pas de part l’utilisation de son cerveau !

          OUF ! A quoi ai-je échappé ? j’aurai pu tomber dans les bras d’un bellâtre, beau mais fat et benêt !

          Rassérénée, je me redresse, m’assois au bord de mon siège et m’enquiers :

- « Alors c’est quand qu’on se met de la crème solaire sur du fond de teint pour faire une partie de foot sur Wii ? »

16 et 17 août 2022 à Nouméa